Sorties cinéma et DVD, janvier 2012
Un blockbuster peut en cacher un quinze autres
La nouvelle année sera lente ou ne sera pas. Ce n’est pas plus mal ; avec le peu de films intéressants qui sortent ces prochaines semaines j’arriverai peut-être à rattraper le retard accumulé ces derniers temps. Entre les beuveries hivernales inévitables et le travail, on trouve peu le temps de caser un Shame ou un Bruegel dans son emploi du temps et la vie quotidienne du spectateur un minimum soucieux de découvrir un large éventail de ce qu’on lui propose revêt d’un coup des airs de parcours du combattant. Donc oui, il y a des films que je voulais voir l’année dernière et que j’ai pour l’instant loupés (mais, soyons francs, très peu de ces films nous resteront en mémoire), et peu de sorties m’enthousiasment suffisamment pour que je daigne vous en parler autrement que sur un ton moqueur (ce dont je ne me priverai évidemment pas). Je vous parlerai donc, en ce jour de l’an, d’une nouveauté attendue de pied ferme, d’une curiosité, ainsi que des films annoncés pour 2012 pour lesquels je nourris un certain espoir. Mais pour l’instant, faisons place à la provocation gratuite et que ceux qui sont facilement offensés détournent les yeux du paragraphe qui suit.
Ceux qui me connaissent ne s’étonneront nullement que J. Edgar, biopic sur un personnage pourtant fascinant mais malheureusement tourné par l’un des réalisateurs actuels les plus surcotés et les moins inventifs, ne me donne aucunement envie. Encore passer deux bonnes heures de ma vie à faire subir à mes innocentes rétines la vision de ce tâcheron de Di Caprio regardant mélancoliquement au loin et laissant au spectateur le soin de meubler les trous béants d'un scénar mal branlé et de son jeu d’acteur ? Avec ou sans maquillage, non merci, les gars. Alors que chez Scorsese au moins, le spectateur assiste à un déploiement virtuose d’idées de mise-en-scène, chez Eastwood le pauvre bougre se retrouve confronté au classicisme le plus ennuyeux qui soit, mâtiné d’une bonne dose d’idéologie sirupeuse et consensuelle étalée à coups de massue. C’est comme une tartine de pain de mie au beurre doux. Une fois qu’on a goûté à autre chose, on s’en passe. Bref, foncez-y dès le 11 janvier, répétez à tout va que c’est génial. Je ne vous croirai pas, c'est comme ça. (Petit pronostique : On a donc droit à J. Edgar et The Iron Lady coup sur coup. Combien de temps avant que nos petits producteurs français flairant le succès de cette nouvelle veine de biopics politiques venus du monde anglo-saxon nous pondent une belle horreur sur de Gaulle ? Qui tiendra la vedette ? A qui la chance de se glisser dans le corps d’Yvonne ?)
Dès le 4 janvier, par contre, rendez-vous est pris pour le second long-métrage de Jeff Nichols. Déjà auteur du très séduisant Shotgun Stories – drame familial sur fond de dirty south dont les personnages étaient tous rudement bien écrits – son Take Shelter s'annonce à la fois aussi maîtrisé et bien plus ambitieux. On espère y retrouver le crayonné fin qui avait fait la réussite d’une première réalisation sobre mais pleine de tendresse, agrémentée – pourquoi pas – d’un brin de folie supplémentaire. La bande annonce est en tout cas prometteuse et Nichols nous offre l’occasion de retrouver Michael Shannon, un excellent acteur américain que l’on ne voit que trop rarement sur nos écrans. La semaine suivante, par désœuvrement, peut-être un peu par curiosité aussi, je me trainerai jusqu’au multiplex pour découvrir Intruders avec Clive Owen (dont le quart d’heure de gloire semble définitivement avoir filé en l’espace d’à peine deux minutes). Pourquoi ? me direz-vous. Et je vous réponds Juan Carlos Fresnadillo. Vous : … ? Moi : 28 semaines plus tard, voyons ! Et ceux qui ont le bon goût d’être d’accord avec moi quant à la qualité de ce brûlot de cinéma bis vis-à-vis me retrouveront dans la salle obscure. Les autres ? Ben ils se retrouveront à regarder Daniel Craig faire semblant de ne pas jouer à James Bond dans la nouvelle mouture de Millenium dès la semaine suivante.
Pour finir, comme je ne aucune sortie DVD marquante veut se donner la peine de poindre son nez, je vais profiter de l’occasion pour vous balancer une liste des films à ne pas rater en 2012, une liste que je vous encourage à compléter de vos propres choix. Pour commencer j’insisterai sur Faust d’Aleksandr Sokurov (Lion d’or à Venise), Wettest Country du duo Hillcoat/Cave (qui nous avait offert le sublime The Proposition) et Into the Abyss de Werner Herzog, trois films à ne rater sous aucun prétexte. Il y aurait aussi des projets de Terrence Malick, de Paul T. Anderson et de Wang Kar-wai bien avancés, mais il serait étonnant qu’on en voit la couleur cette année. Sinon, pêle-mêle : Savages d’Oliver Stone, This is Forty de Judd Apatow, Cogan’s Trade d’Andrew Dominik (L’Assassinat de Jesse James par le Lâche Robert Ford), La Taupe de Thomas Alfredson (Morse), Gatsby le magnifique de Baz Lurhmann, Sur la route de Walter Salles, Take This Waltz de Sarah Polley. Pas si mal, du moins si la moitié des œuvres citées s’avère être regardable. Sur ce, j’attends vos propres recommandations et je vous souhaite une bonne année, bonne santé et, de manière générale, plein de bonnes choses (comme quoi je ne suis pas si odieux au fond).