En bref : Moonrise Kingdom de Wes Anderson

Publié le par Marc

Moonrise Kingdom
Moonrise Kingdom
Réalisé par Wes Anderson
(2012)

On commençait à se lasser depuis quelques temps déjà de Wes Anderson et de sa fâcheuse tendance à resservir toujours la même histoire à la même sauce. On en était même arrivé à se demander s’il aurait la capacité de se sortir de la torpeur qui avait plombé A bord du Darjeeling Limited. Autant donc vous dire que, dans ces parages, Moonrise Kingdom était fortement attendu au tournant. Contre toutes mes attentes, avec cette histoire d’enfants fugueurs, Anderson réussit le pari, si ce n’est à complètement se réinventer (ce que personne ne souhaitait de toutes façons), du moins à porter un regard neuf et rafraichissant sur les thèmes et motifs qui l’obsèdent depuis ses premières réalisations et que le spectateur prendra enfin du plaisir à retrouver. En plongeant entièrement pour la première fois dans le monde de l’enfance, un univers qui semblait habiter ses films précédents sans jamais qu’ils n’y soient réellement consacrés, Anderson trouve enfin un terrain où laisser libre-cours à son imaginaire débridé et sa loufoquerie désuète, mettant en scène un récit d’aventure teinté de mélodrame qu’il parvient à investir d’une dimension mythique au travers de l’évocation d’images ayant sans doute marqué sa propre jeunesse comme celle de sa génération, des images qui vont du délicieux personnage campé par Tilda Swinton, tout droit sorti d’un film Disney, aux références nombreuses et évidentes à Peter Pan et à la littérature enfantine de manière générale, tout en passant par d’autres d’une nature plus traumatique et ancrées dans l’inconscient collectif, entre autres par le biais du cinéma, notamment lorsque la compagnie de scouts semble se métamorphoser en un escadron de GI’s plongé dans l’enfer du Vietnam d’un Kubrick ou d’un Coppola. Poursuivant et affinant son travail de mise en scène et de narration, qui se trouvent ici plus stylisées que jamais (un parti-pris qu’on encourage fortement), Anderson brasse comme à son habitude une multitude de thèmes plus ou moins graves sur un ton léger qui se montre souvent désemparant tout en retrouvant cette fraîcheur qui nous avait emballé dans Rushmore ou La Famille Tenenbaum et que l’on avait eu la triste sensation de voir se dissiper par la suite. Anderson signe donc avec Moonrise Kingdom son meilleur film depuis des lustres et ça fait plaisir. Seul bémol ; encore une fois la copie numérique, franchement dégueulasse, est loin d’être à la hauteur du film, saturant bon nombre de plans de bruit et gâchant quelque peu le plaisir visuel au spectateur. Au risque de me répéter, quel est l’intérêt, hormis les économies sur les frais de distribution et de diffusion qui semblent se répercuter à l’inverse sur le prix des billets, de projeter un tel film en numérique ? C’est sans doute plus pratique, mais en termes de qualité d’image il n’y a pas photo (et ce n’était pas du tout pour le bête plaisir du calembour que je me permets cette remarque). Ce n’est pas possible qu’il n’y ait que moi que ça énerve.

Publié dans Nouvelles du front

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